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L ' u S i n e _ Ă  _ g a Z 2022-08-02T08:48:56+01:00 Jean Martial-Guilhem urn:md5:b7fa0bbd53f4d675f0abe6c8a4944e26 Dotclear Changement d'adresse urn:md5:b7c5171fa86b26ca2d6bb1ef34467d6a 2018-08-31T11:58:00+01:00 2019-03-07T21:25:28+00:00 Jean Martial-Guilhem <h2>Retrouvez L'uSine Ă  gaZ Ă  sa nouvelle adresse : </h2> <h2><a href="http://lusinagaz.jeanmartialguilhem.com/index.php?" hreflang="fr">http://lusinagaz.jeanmartialguilhem.com/index.php?</a></h2> <div><a href="http://lusinagaz.jeanmartialguilhem.com/index.php?" hreflang="fr"><img src="http://lusinagaz.free.fr/blog/images/.Screenshot_2018-09-21_L__uSine_a_gaZ_m.png" alt="Screenshot_2018-09-21_L__uSine_a_gaZ.png" title="Screenshot_2018-09-21_L__uSine_a_gaZ.png, sept. 2018" /></a></div> L'invention de l'humanitĂ©. urn:md5:22234f898e4f30b2edc056e4c54a36e2 2015-06-27T22:18:00+01:00 2019-03-07T21:25:28+00:00 Jean Martial-Guilhem Politique <p>Il est un fait moderne et rĂ©curent qui consiste Ă  Ă©valuer tout phĂ©nomĂšne historique Ă  l'aune des valeurs morales de notre temps. S'il existe bien une intemporalitĂ© et une universalitĂ© de la loi morale, Kant nous a appris qu'elle ne saurait ĂȘtre que personnelle et surtout non encore actuelle, la morale demeure un idĂ©al Ă  rĂ©aliser dans l'humanitĂ©. L'idĂ©e d'humanitĂ© justement -Ă  partir de laquelle sont Ă©valuĂ©s nombres de faits historiques- n'est pas Ă  l'humanitĂ© une donnĂ©e innĂ©e.</p> L'esthĂ©tique du siĂšcle. urn:md5:3f9a8747890e273edcc33a6727f7b9e7 2014-11-23T13:48:00+00:00 2019-03-07T21:25:28+00:00 Jean Martial-Guilhem L'idĂ©e c'est la perspective <p>La dent longue et l'idĂ©e courte, c'est l'esthĂ©tique du siĂšcle.</p> La fin de la propriĂ©tĂ© privĂ©e. urn:md5:77d3bb87561a0412a25be238d3f11f0b 2014-10-14T10:58:00+01:00 2019-03-07T21:25:28+00:00 Jean Martial-Guilhem Politique <p>De la propriĂ©tĂ© privĂ©e nait le capitalisme. La fin de la propriĂ©tĂ© privĂ©e suffirait-elle Ă  nous en libĂ©rer&nbsp;?</p> <p>En affirmant que "la propriĂ©tĂ© privĂ©e est un vol", Proudhon -Ă  son insu sans doute- commet un paradoxe. En effet tout vol prĂ©suppose la propriĂ©tĂ© et on ne peut voler que celui qui est dĂ©jĂ  propriĂ©taire. Ainsi de qui la premiĂšre propriĂ©tĂ© privĂ©e serait-elle le vol&nbsp;? Penser la propriĂ©tĂ© privĂ©e comme un vol suppose de distinguer Ă  l'instar de Locke deux sortes de propriĂ©tĂ©&nbsp;: une propriĂ©tĂ© exclusive -qui renvoie Ă  la propriĂ©tĂ© privĂ©e elle-mĂȘme- et une propriĂ©tĂ© que l'on appellera inclusive. En effet pour Locke, Dieu a donnĂ© la nature Ă  tous sans la donnĂ©e Ă  personne en particulier, elle appartient donc Ă  tout le monde sans appartenir Ă  personne. La communautĂ© des hommes possĂšde la nue-propriĂ©tĂ© de ce dont chacun est usufruitier. Si tous ont le droit d'en user, nul n'en est le propriĂ©taire exclusif. C'est pourquoi la propriĂ©tĂ© privĂ©e devient illĂ©gitime, elle est un vol fait Ă  l'humanitĂ© toute entiĂšre. Ainsi la sociĂ©tĂ© civile qui s'Ă©rige sur la dĂ©fense de la propriĂ©tĂ© privĂ©e devient-elle suspecte. Et Rousseau affirmera Ă  juste titre que "le premier qui enclot un terrain, qui dit ceci est Ă  moi et qui trouve assez d'imbĂ©ciles pour le croire, celui-lĂ  est le fondateur vrai de la sociĂ©tĂ© civile." Mais si la loi de la sociĂ©tĂ© civile protĂšge en premier lieu la propriĂ©tĂ© privĂ©e, elle vise aussi Ă  condamner la pauvretĂ©. Elle protĂšge les forts et condamne les faibles de telle sorte que les faibles se trouvent dans l'obligation de vendre leur force de travail&nbsp;; ce en quoi consiste l'aliĂ©nation chez Marx. "N'ayant pu faire que le juste soit fort, on a fait en sorte que le fort fut juste", pourrions-nous dire avec Pascal.<br /> Aussi la propriĂ©tĂ© privĂ©e constitue le nerf de la guerre, l'Ă©picentre de tout conflit et la matrice de la crise de notre monde contemporain, dans la mesure oĂč elle signe l'acte de naissance du systĂšme capitaliste et libĂ©ral ainsi que l'aliĂ©nation du travail. Ce qu'en leur temps avait dĂ©jĂ  analysĂ©s Montesquieu et Rousseau. Dans les sociĂ©tĂ©s libĂ©rales et capitalistes fondĂ©es sur la propriĂ©tĂ© privĂ©e, l'intĂ©rĂȘt particulier prime en effet sur l'intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral. "La loi du monde nous apprend, nous dit Montesquieu, Ă  ne jamais nous oublier nous-mĂȘmes" et Ă  faire passer son intĂ©rĂȘt avant l’intĂ©rĂȘt de tous. Ce qui gĂ©nĂšre Ă©goĂŻsme en l'homme et conflits entre les hommes.<br /> Si nos sociĂ©tĂ©s capitalistes semblent survire Ă  tous les coups qui lui sont portĂ©s, ce n'est qu'au prix du sacrifice de ceux qu'elle sacrifie par principe, les travailleurs. Ce n'est jamais le systĂšme capitalisme qui s’affaiblit mais la population laborieuse qui se soumet&nbsp;; persuadĂ©e qu'il n'y a pas d'alternative, tout en vĂ©nĂ©rant la rĂ©ussite de ceux qui y sont par naissance conditionnĂ©s, lorsque dans le mĂȘme temps les mĂ©canismes de reproduction et de dĂ©terminisme sociaux renvoient le peuple Ă  son impuissance fantasmĂ©e.<br /></p> <p>La fin de la propriĂ©tĂ© privĂ©e pourrait-elle nous sauver des affres d'un systĂšme capitaliste&nbsp;? La fin de la propriĂ©tĂ© privĂ©e se conçoit aujourd'hui Ă  partir de la disparition progressive des biens matĂ©riels et des supports physiques au profit du numĂ©rique dans les produits culturels. Mais cela ne va pas sans poser quelques problĂšmes.Puisque dĂšs lors s'ouvre Ă  nous un monde oĂč tout se vaut, un monde sans hiĂ©rarchie oĂč disparaissent maĂźtres et experts. Ce sont ici en tout cas les arguments de ceux qui sont -comme les qualifie RanciĂšre- dans la haine de la dĂ©mocratie&nbsp;; de ceux qui considĂšrent la dĂ©mocratie comme un despotisme populaire.<br /> Avec l'idĂ©e d'une dĂ©mocratie dĂ©libĂ©rative nĂ©e du contrat social, Rousseau avait sans doute dĂ©jĂ  tracĂ© avant l'heure la possibilitĂ© d'une troisiĂšme voie entre capitalisme et Ă©tatisme, entre libĂ©ralisme et ce qui apparaitra plus tard comme socialisme. Le contrat social consiste Ă  remettre sa libertĂ© et sa propriĂ©tĂ© non pas aux mains d'un souverain comme chez Hobbes mais aux mains de la communautĂ©. Autrement dit chacun se dessaisie de la partie essentielle de lui-mĂȘme. Mais loin d'ĂȘtre une aliĂ©nation, se dessaisissement est en fait l'acte par lequel l'unitĂ© d'un peuple se forme Ă  partir de la multitude d'intĂ©rĂȘts divergents. Mais cela suppose ce que Montesquieu appelait ironiquement "l'angĂ©lisme politique" qui consiste Ă  savoir s'oublier soi-mĂȘme au profit de l'intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral. Car qu'il le soit par nature ou qu'il le soit devenu par nĂ©cessitĂ© sociale et culturelle, l'homme est aujourd'hui Ă©goĂŻste. Cependant comme l'a montrĂ© Adam Smith, de l'intĂ©rĂȘt particulier peut naitre la nĂ©cessitĂ© d'un accord avec l'intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral. Il ne s'agit plus d'angĂ©lisme politique ou de morale pure, mais d'une morale utilitariste qui pourrait se formuler selon l'injonction&nbsp;: "Ne fais aux autres ce que tu ne voudrais pas qu'ils te fassent." Il est alors dans l'intĂ©rĂȘt particulier du commerçant d'ĂȘtre juste en traitant de la mĂȘme maniĂšre tous ses clients mĂȘme ceux qui sont de ses amis, sans quoi ceux-ci demeureront ses seuls clients. Mais l'intĂ©rĂȘt particulier n'est pas l'Ă©goĂŻsme et l'individualisme qui caractĂ©risent nos sociĂ©tĂ©s modernes. Le systĂšme capitaliste est fondĂ© sur l'inĂ©galitĂ© qu'instaure le jeu de l'offre et de la demande. Certes comme l'affirme Rawls, les inĂ©galitĂ©s peuvent ĂȘtre tolĂ©rĂ©es si elles sont dans l'intĂ©rĂȘt du plus grand nombre, mais de fait le capitalisme est incompatible avec l'intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral. L'intĂ©rĂȘt du plus grand nombre n'est pas l'intĂ©rĂȘt de tous.</p> La dĂ©monstration. urn:md5:df4fa246f231b08b1123ad067601facc 2014-10-03T15:57:00+01:00 2019-03-07T21:25:28+00:00 Jean Martial-Guilhem Philosophie <p>DĂ©montrer consiste Ă  fonder l'apparence pour la connaitre avec certitude, ramener ce qui se montre Ă  son fondement pour le connaitre certainement. Le fondement est l'Ă©lĂ©ment de la dĂ©monstration. Il est ce qui rend raison d'une chose, sa cause. Il est l'idĂ©e chez Platon, l'essence chez Aristote ou encore l'Ă©vidence chez Descartes.</p> VolontĂ© de puissance et Ă©ternel retour. urn:md5:2c472885cf33d6545f4ff6b1cb87ff74 2014-10-02T16:21:00+01:00 2019-03-07T21:25:28+00:00 Jean Martial-Guilhem Philosophie Kant moraleNietzschevolontĂ© <p>Comprendre le sens du syntagme "volontĂ© de puissance" chez Nietzsche suppose de l'interprĂ©ter dans la perspective de la morale ou plus prĂ©cisĂ©ment de l'Ă©thique. La morale en effet limite la volontĂ© par le devoir lorsque l'Ă©thique limite la volontĂ© par la puissance ou le pouvoir.</p> <p>Il est facile de se mĂ©prendre sur le sens de cette notion de "volontĂ© de puissance" chez Nietzsche. La volontĂ© de puissance ne consiste pas Ă  vouloir le pouvoir ou la puissance, elle ne consiste pas Ă  exercer l'un ou l'autre en soumettant et dominant d'autres volontĂ©s. Au contraire soumission et domination sont les symptĂŽmes d'une volontĂ© rĂ©active chez Nietzsche, elles sont le signe d'une volontĂ© faible. La soif de domination que l'on nomme communĂ©ment mais improprement puissance est en rĂ©alitĂ© faiblesse. C'est ce qu'illustre la fable de l'agneau et de l'oiseau de proie dans <em>GĂ©nĂ©alogie de la morale</em>. Que peut-on entendre alors par "volontĂ© de puissance" si ce n'est la volontĂ© de domination&nbsp;? Pour en comprendre le sens, il faut ramener cette notion dans l'horizon de la morale.<br /> Traditionnellement la morale rĂ©pond Ă  la question&nbsp;: "Que dois-je faire ?" Elle dĂ©termine ce que le sujet doit ou ne doit pas faire, elle fixe les normes du bien et du mal et contraint la volontĂ© Ă  ces normes. La volontĂ© doit vouloir le bien et rejeter le mal, elle doit se contraindre au devoir. Si la volontĂ© est infinie c'est Ă  dire infiniment libre comme l'affirme Descartes, elle doit pourtant se dĂ©terminer Ă  agir selon certaines rĂšgles, maximes ou conduites, qui sont celles du devoir. IndĂ©terminĂ©e, la volontĂ© n'est rien, elle est comme nulle. La libertĂ© d'indiffĂ©rence est en effet le plus bas degrĂ© de la libertĂ© comme l'affirme Descartes. Elle n'est que dans la stricte mesure oĂč elle se dĂ©termine Ă  ceci plutĂŽt qu'Ă  cela. En tant que rĂšgles de conduite le devoir limite donc la volontĂ© mais dans la strict mesure oĂč elle lui donne forme afin de dĂ©terminer son ĂȘtre. La volontĂ© peut alors ĂȘtre dĂ©finie comme la facultĂ© de se dĂ©terminer Ă  agir selon la reprĂ©sentation de certaines lois. La volontĂ© sera alors dite hĂ©tĂ©ronome lorsqu'elle est dĂ©terminĂ©e par des mobiles sensibles extĂ©rieurs, et autonome lorsqu'elle est dĂ©terminĂ©e par la loi morale qu'elle se donne Ă  elle-mĂȘme librement. Cette loi est pour Kant, morale lorsqu'elle est universelle. Elle prend alors la forme de l'impĂ©ratif catĂ©gorique&nbsp;: "Agis de telle sorte que la maxime de ton action puisse valoir en mĂȘme temps comme une loi universelle." L’universalitĂ© de la maxime ou de la loi confĂšre Ă  l’acte son caractĂšre moral. La volontĂ© doit vouloir l’universel, ce qui peut ĂȘtre accompli sans contradiction. Ainsi la volontĂ© perd tout caractĂšre propre et singulier. La volontĂ© individuelle devient universelle, le «&nbsp;Je&nbsp;» devient un «&nbsp;Nous ».<br /> A la volontĂ© morale et universelle autrement dit anonyme et impersonnelle, Nietzsche oppose la volontĂ© de puissance qui ne consiste pas Ă  agir selon la forme universelle de la loi morale mais Ă  vouloir ce que je peux supporter. Le pouvoir se substitue au devoir dans la limite de la volontĂ©. La volontĂ© de puissance signifie donc vouloir ce que je peux supporter. Et ce que la volontĂ© peut supporter dĂ©termine ontologiquement celle-ci, lui donne forme et figure. En derniĂšre instance, ce que peut la volontĂ© relĂšve et renvoie Ă  la notion d'Ă©ternel retour. En effet ne relĂšve de ma puissance que ce que je peux Ă©ternellement supporter. Ainsi Ă  l'impĂ©ratif catĂ©gorique de Kant se substitue cette autre impĂ©ratif que nous pourrions formuler de la sorte&nbsp;: "Agis de telle sorte que ce que tu fais tu puisses le faire Ă©ternellement". N’est bon pour soi, que ce qui peut ĂȘtre fait Ă©ternellement, ce dont le retour Ă©ternel suscite de la joie augmente les capacitĂ©s d'actions et Ă©loigne de la souffrance et de la passivitĂ©. Le syntagme «&nbsp;volontĂ© de puissance&nbsp;» caractĂ©rise l’expression Ă©thique de la singularitĂ© du sujet, sous la forme du bon et du mauvais pour soi, de ce que je peux ou ne peux pas faire sous l’aspect de l’éternitĂ©. L'Ă©ternel retour devient la rĂšgle de la volontĂ©, mais d'une volontĂ© non plus universelle mais singuliĂšre.</p> Carte postale. urn:md5:6cdd269761803809171ec1c3a8163d2c 2014-10-02T15:21:00+01:00 2019-03-07T21:25:28+00:00 Jean Martial-Guilhem Les Ă©ditos d'AdĂšle <p>Édito du onziĂšme numĂ©ro des Cahiers d'AdĂšle.</p> <p>Ce carrĂ© blanc au dos de paysages, d'architectures Ă  l'honneur ou de tableaux cĂ©lĂšbres&nbsp;; au dos d'une Joconde Ă  moustache que l'on moque sans savoir qu'LHOOQ, d'une fille nue alanguie sur le sable, la peau brunie sertie d'or et de turquoise, ce carrĂ© blanc sur lequel on inscrit l'Ă©ternel Ă©phĂ©mĂšre. "Il fait beau les enfants vont biens", "Les gens sont gentils. papi m'a achetĂ© une glace, Ă  la pĂȘche aux canards je me suis fait des amis."<br /> Tout a disparu, le bleu du ciel, la chaleur du sable, les belles filles et le marchand de glace. Les enfants sont grands et le papi est mort. Tout a disparu sauf la trace, un signe sans signification au dos de cette vieille dame qui ne vieillit pas au fond d'un vieux carton, du tiroir d'une armoire ou d'un antique salon.<br /> C'est un acte de rĂ©sistance que de prendre le temps pour le donner aux choses qui n'ont fait que passer, d'ensorceler la mort sur ce petit carrĂ© blanc.</p> GĂ©nĂ©ration. urn:md5:cebf2f846a1cfb5a8ecbfe013b0347c9 2014-10-02T15:11:00+01:00 2019-03-07T21:25:28+00:00 Jean Martial-Guilhem Les Ă©ditos d'AdĂšle <p><br /> ThĂšme du dixiĂšme numĂ©ro des Cahiers d'AdĂšle.</p> <p>Toute gĂ©nĂ©ration est nĂ©cessairement spontanĂ©e, que cette derniĂšre soit naturelle ou culturelle. Elle n’admet ni condition ni virtualitĂ© qu’elle ne ferait qu’actualiser.<br /> Rien ne la prĂ©sage, elle vient comme un imprĂ©vu, inouĂŻe et inattendue, dans la sĂ©rie causale des Ă©vĂ©nements dĂ©terminĂ©s&nbsp;: l’hĂ©ritage de la gĂ©nĂ©ration antĂ©rieure n’est jamais totalement assumĂ©, les attentes escomptĂ©es vis-Ă -vis de la gĂ©nĂ©ration Ă  venir sont rĂ©guliĂšre- ment manquĂ©es. Toute gĂ©nĂ©ration est alors issue de la libertĂ© comme capacitĂ© d’initier soi-mĂȘme une nouvelle sĂ©rie causale.<br /> Aussi la gĂ©nĂ©ration, si elle dĂ©signe le commun et l’identique, ne peut se penser qu’aux travers des traits de la singularitĂ© et de la diffĂ©rence. Sans doute, avant d’ĂȘtre un nom commun X ou Y, elle est d’abord un nom propre, le nom du premier, celui qui commence et qui gouverne, celui qui rĂ©pĂšte dĂ©jĂ  toute la sĂ©rie. L’anormal qui transforme le normal, l’anomalie qui – Ă  la lettre – transforme la loi, la «&nbsp;nomalitĂ© ». Il y a autre chose que de la reproduction. Chaque gĂ©nĂ©ration porte en elle ses icĂŽnes, ses vibrations et son aura. De la rĂ©pĂ©tition du mĂȘme surgissent la diffĂ©rence et la nouveautĂ©&nbsp;: l’unique et paradoxalement l’immuable.<br /> GĂ©nĂ©rer consistera alors Ă  inventer de nouvelles formes d’existences en faisant table rase du passĂ© et en instaurant un nouvel ordre.<br /> De ce point de vue toute gĂ©nĂ©ration est punk.</p> MĂ©canique. urn:md5:3887bcce341b1f9e1e0216bdd80354f9 2014-10-02T15:09:00+01:00 2019-03-07T21:25:28+00:00 Jean Martial-Guilhem Les Ă©ditos d'AdĂšle <p>ThĂšme du neuviĂšme numĂ©ro des Cahiers d'AdĂšle.</p> <p>La nature a ses lois qui parfois contredisent les dĂ©sirs et la volontĂ© des hommes. De cette contradiction naĂźt l’une des formes de hasard qui qualifie des effets dont nous ignorons les causes. La nature a des raisons que la raison ignore et produit dans beaucoup de cas des effets qui sont contraires Ă  l’intĂ©rĂȘt des hommes. Pour s’en protĂ©ger, les hommes ont recours Ă  la ruse, qui en grec se dit <em>mĂ©chanĂ©</em> et qui donnera le terme mĂ©canique. La mĂ©canique consiste donc dans la ruse nĂ©cessaire Ă  l’accomplissement de ses dĂ©sirs et volontĂ©s. Art de l’illusionniste ou du faussaire.<br /> La mĂ©canique se joue dans un rapport de force qui consiste par ruse Ă  arraisonner toute chose Ă  nos ïŹ ns. Loin de dĂ©couvrir ce dont elle se sert, la mĂ©canique l’utilise pour satisfaire ses ïŹnalitĂ©s. Pour autant, on ne saurait commander Ă  la nature qu’en lui obĂ©issant. Se servir d’une chose suppose donc que l’on sache ce qu’elle est. Tout combat, toute ruse, loin d’anĂ©antir, rĂ©vĂšle ce qui est combattu.</p> L'icĂŽne. urn:md5:b309f345a748e8e57e8b4b917cf497c3 2014-10-02T15:06:00+01:00 2019-03-07T21:25:28+00:00 Jean Martial-Guilhem Les Ă©ditos d'AdĂšle <p>L'Ă©dito du huitiĂšme numĂ©ro des Cahiers d'AdĂšle.</p> <p>Il est possible de diviser toutes les choses que porte le monde en deux catĂ©gories&nbsp;: les idoles et les icĂŽnes, avec l’idĂ©e ou l’original en ligne de partage. Ces deux maniĂšres d’ĂȘtre des Ă©tants nous renvoient aux distinctions platoniciennes&nbsp;: original, copie, simulacre&nbsp;; oĂč l’icĂŽne se dit copie, conforme Ă  l’original et l’idole se dit simulacre qui n’entretient aucun rapport avec ce qu’elle prĂ©tend ĂȘtre. Aussi, de Platon Ă  l’Ɠuvre de Magritte Ceci n’est pas une pipe, l’art dans sa totalitĂ© renvoie pour la pensĂ©e mĂ©taphysique au simulacre. Et c’est Ă  ce titre que Pascal dĂ©noncera la peinture par sa vanitĂ©&nbsp;: «&nbsp;Quelle vanitĂ© que la peinture qui attire l’admiration par la ressemblance des choses dont on n’admire point les originaux ». Bref pour prendre Ă  Platon son exemple, le lit du charpentier est conforme Ă  l’idĂ©e ou original en tant qu’il sert Ă  dormir, lorsque le lit du peintre prĂ©tend ĂȘtre ce qu’il n’est pas dans la mesure oĂč jamais il ne servira Ă  dormir. Si rien ne distingue dans leur visibilitĂ© l’idole de l’icĂŽne, le tout visible de l’idole ne donne rien Ă  voir au-delĂ  d’elle-mĂȘme. LumiĂšre aveugle de la pornographie, opaque et sans mystĂšre. Lorsque l’icĂŽne donne dans ses traits visibles le chiffre du mystĂšre, l’inouĂŻ, l’invu, l’inapparaissant en personne, bref l’idĂ©e mĂȘme. À la pornographie idolĂątre, l’icĂŽne oppose le mystĂšre Ă©rotique. Lorsque Diotime dans Le Banquet de Platon prĂ©sente Eros comme fils de Poros et de PĂ©nia, fils d’un Dieu et d’une mortelle, il se donne alors comme l’intermĂ©diaire, le passeur entre deux mondes, du mortel et du divin. Dans le visible de l’icĂŽne filtre l’origine perdue.</p> L'ivresse. urn:md5:307833716a7c1d84e20c1d5789dfa1d1 2014-10-02T15:04:00+01:00 2019-03-07T21:25:28+00:00 Jean Martial-Guilhem Les Ă©ditos d'AdĂšle <p>L'ivresse Ă©tait le thĂšme du septiĂšme numĂ©ro des Cahiers d'AdĂšle dont voici l'Ă©dito.</p> <p>Rien de grand ne s'est fait sans ivresse.</p> Le faux urn:md5:cd35f0357f61f3c574170af35fc5dbc3 2014-10-02T14:44:00+01:00 2019-03-07T21:25:28+00:00 Jean Martial-Guilhem Les Ă©ditos d'AdĂšle <p>Editos du second numĂ©ro des Cahiers d'adĂšle consacrĂ© au "faux".</p> <p>Les Cahiers d’AdĂšle consacre le deuxiĂšme numĂ©ro au thĂšme du faux. Essais, nouvelles ou illustrations traduisent de façon Ă©loquente cet univers du factice qui semble rĂ©gir de façon invisible notre monde sensible, du simple mensonge que tout un chacun a pu expĂ©rimenter dans la vie quotidienne, Ă  des rĂ©flexions plus holistiques sur les questions de nature et culture Ă  travers l’idĂ©e de l’art comme imitation ou transcendance de la nature, en passant par des interrogations sur l’identitĂ©. Face au faux, au factice, Ă  l’artifice, qui sommes-nous quand nous disons «&nbsp;je&nbsp;» ? Et, face Ă  cela, qu’en est-il du concept du Vrai, de la VĂ©ritĂ©&nbsp;? La fabrique du faux devient alors une entreprise complexe et ambiguĂ« qui Ă©largit son emprise sur le monde des idĂ©es et des sentiments. AgencĂ© en rubriques, ce volume dĂ©voile une rĂ©alitĂ© cachĂ©e qui rejoint et complĂšte le thĂšme prĂ©cĂ©demment explorĂ© de l’invisible. Faussaires, arnaqueurs et escrocs en tous genres sont naturellement les piĂšces maĂźtresses de cet Ă©chiquier du mensonge, mais ces prestidigitateurs ont besoin d’un public de croyants pour crĂ©er l’illusion et l’artifice. RĂ©alitĂ© et croyance semblent se situer comme pourrait le dire J. L. BorgĂšs sur des «&nbsp;chemins aux sentiers qui bifurquent », embrassant des visions du monde oĂč faits avĂ©rĂ©s et besoins de croire entretiennent des rapports complexes. Ce dĂ©sir d’absolu pourtant irrĂ©ductible Ă  toutes interprĂ©tations scientifiques reste au final l’essence de tous les possibles. C’est ce que les auteurs nous donnent Ă  lire.</p> Le pardon urn:md5:642203f249425dec86ce098384aea120 2010-03-07T18:16:00+00:00 2019-03-07T20:25:28+00:00 jean Les Ă©ditos d'AdĂšle <p>L'appel Ă  contribution du numĂ©ro six des Cahiers d'AdĂšle consacrĂ© au Pardon en partenariat avec le Marathon des Mots.</p> <p><strong>Appel Ă  contributions n°6&nbsp;: «&nbsp;le pardon »</strong><br /> Si l’on pardonne c’est que paradoxalement il y a de l’impardonnable. «&nbsp;Le pardon est mort Ă  Auschwitz », affirmait le philosophe JankĂ©lĂ©vitch. Le pardon se tient au-delĂ  des limites, Ă  l’excĂšs. Il excĂšde l’excusable lorsque l’excuse excuse, paye et fait payer, efface les dettes. Qu’elle renvoie Ă  quelques circonstances attĂ©nuantes ou aux rachats de la faute, par l’excuse, nul n’est mĂ©chant volontairement. Le pardon, quant Ă  lui, est difficile car, dans la situation limite oĂč il s’exerce, il se donne sans retour. Que gagne-t-on alors Ă  pardonner si le pardon n’efface rien&nbsp;? Loin d’exclure la mĂ©moire, le pardon la libĂšre de sa douleur, du ressentiment et du dĂ©sir de vengeance. Il libĂšre le prĂ©sent pathologiquement enfermĂ© dans son passĂ© afin d’ouvrir un avenir possible. La douleur de l’impardonnable, qu’elle soit publique ou privĂ©e, qu’elle soit celle d’un peuple ou d’un individu, s’efface dans le pardon. Et la mĂ©moire enfin libĂ©rĂ©e pourra conjuguer au futur son devoir, sous la forme de l’impĂ©ratif&nbsp;: «&nbsp;tu n’oublieras pas ».<br /></p> <p><strong>Edito :</strong><br /></p> <p>Si l’on pardonne c’est que paradoxalement il y a de l’impardonnable. « Le pardon est mort à  Auschwitz », affirmait le philosophe JankĂ©lĂ©vitch.  Le pardon se tient au-delà des limites, à l’excĂšs. Il excĂšde  l’excusable lorsque l’excuse excuse, paye et fait payer, efface les dettes.  Qu’elle renvoie à quelques circonstances attĂ©nuantes ou aux rachats de la faute, par l’excuse, nul n’est mĂ©chant volontairement. Le pardon, quant à lui,  est difficile car, dans  la situation limite oĂč  il s’exerce, il se donne  sans retour. Que gagne-t-on alors à pardonner si le pardon n’efface  rien ? Loin d’exclure la mĂ©moire, le pardon la libĂšre de  sa douleur, du ressentiment et du dĂ©sir de vengeance.  Il libĂšre le prĂ©sent pathologiquement enfermé dans son  passé afin d’ouvrir un avenir possible. La douleur de  l’impardonnable, qu’elle soit publique ou privĂ©e, qu’elle  soit celle d’un peuple ou d’un individu, s’efface dans le  pardon. Et la mĂ©moire enfin libĂ©rĂ©e pourra conjuguer au  futur son devoir, sous la forme de l’impĂ©ratif : « tu n’ou- blieras pas ». </p> La ville. urn:md5:106700271cef3a32cb9603225bd0c7fc 2010-03-07T18:15:00+00:00 2019-03-07T20:25:28+00:00 jean Les Ă©ditos d'AdĂšle <p>L'Ă©ditorial du cinquiĂšme numĂ©ro des Cahiers d'AdĂšle consacrĂ© Ă  la ville.</p> <p>Que l’on descende en ville, qu’on s’y promĂšne, que l’on y tue, ou que l’on s’y perde, tous ces «&nbsp;on&nbsp;» ne nous disent rien ou pas grand-chose de la ville. Pour une fois c’est la scĂšne et non ce qui s’y joue qui nous intĂ©resse. Quelles que soient les actions possibles qui s’y mĂšnent, la ville demeure pour nous le premier des possibles, elle est la possibilitĂ© de toute possibilitĂ©. Et si la mort Ă  l’inverse signe notre finitude comme possibilitĂ© de toute impossibilitĂ© alors la ville est la vie mĂȘme. La vie des hommes, la vie plurielle, la vie commune, bref un monde. Aussi retrouve-t-elle au-delĂ  des thĂšmes modernes de l’intime et du privĂ©, l’archaĂŻsme premier et grec du public et du commun. La ville comme monde est un ensemble de signes, de paroles, d’échanges et de luttes. C’est le monde commun des hommes dans lequel ceux-ci vivent et communiquent. Par la ville le «&nbsp;je », le «&nbsp;tu », le «&nbsp;il », n’ont de sens que dans l’économie du «&nbsp;nous&nbsp;» ou d’une identitĂ© plurielle. La citĂ© est pour Platon, de toutes les oeuvres humaines, la plus tragique. Le bĂątisseur est le vĂ©ritable tragĂ©dien et la citĂ© la plus belle des tragĂ©dies, celle qui aprĂšs l’errance des hommes cĂšle leur alliance au divin. Au meurtre suit la rĂ©paration, au dĂ©sordre suit l’ordre, Ă  la nature, la culture, au travail, le jeu. Le temps des citĂ©s est le temps des fĂȘtes et du repos&nbsp;: «&nbsp;Le temps des fĂȘtes est un temps divin, venu de la pitiĂ© divine pour la douleur des hommes ». La ville arrache les hommes de leurs nĂ©cessitĂ©s naturelles, du devenir, du naĂźtre et du pĂ©rir pour les Ă©lever au divin. Mais Ă  l’époque de ce que nous avons coutume d’appeler la mondialisation, le nous par lequel le je trouve sens, devient un «&nbsp;on&nbsp;» anonyme et sans qualitĂ©, un «&nbsp;on&nbsp;» disponible au profit. La ville devient ce dans quoi l’on mange, ce dans quoi l’on dort et l’on travaille. Bref la ville devient jungle, plus terrifiante encore qu’un hypothĂ©tique Ă©tat de nature, un Ă©tat sans culture qui rĂ©duit le corps Ă  la souffrance des nĂ©cessitĂ©s immĂ©diates. Alors je, tu, il
 on aboie.</p> International Hyper Rythmique, Uncity Nation out now. urn:md5:579075d68488b283c5c89128f89dfa6d 2009-09-17T14:41:47+00:00 2019-03-07T20:25:28+00:00 jean L'idĂ©e c'est la perspective <p>International Hyper Rythmique sort son premier album Uncity Nation sur le label Ocean Music.</p> <p><a href="http://ihrmusic.com/" hreflang="fr">International Hyper Rythmique</a><br /> <a href="http://www.ocean-music.fr/" hreflang="fr">Ocean Music</a><br /></p> <p><img src="http://lusinagaz.free.fr/blog/images/ihr/Promo Uncity nation1.png" alt="" /></p> La ligne d'univers dans le plaisir du corps. urn:md5:60ecd5342417b313c1e02b177b41b441 2009-09-13T22:58:48+00:00 2019-03-07T20:25:28+00:00 jean L'idĂ©e c'est la perspective <p>Des ambitions littĂ©raires sans doute aussi honteuse que la masturbation.</p> <p>Dans un rapport encore objectif Ă  son corps, elle touchait son ventre, constatait ces petits bourrelets qui se formaient quand elle se courbait pour se regarder. L’alcool sans doute qu’elle avait ingurgitĂ© hier plus que de mesure, participait Ă  ses rondeurs matinales. Socialement Ă  la limite de la dĂ©cence, l’onde qui se formait Ă  la surface de son ventre –lorsqu’elle y posait trop violemment le doigt- finissait par l’exciter. Alors elle dĂ©sirait son corps, jouir de le faire jouir, comme cette derniĂšre amarre –la plus sure en vĂ©ritĂ©- Ă  la consistance des choses.<br /> Au bout d’un certain temps, l’intĂ©rĂȘt pour la chose radiodiffusĂ©e s’était transformĂ© en une attention Ă  sa propre rĂ©sistance. Au point que l’interview venue, dans une grande fatigue, elle coupa la radio et commença de se masturber, timidement et par dĂ©pit&nbsp;; comme si la jouissance devait la libĂ©rer de sa fatigue, de son ennui. Et cette figure du «&nbsp;comme si » lĂ©gitimait du point de vue moral, l’acte masturbatoire. Changer d’état, changer de lieu, elle se dĂ©cida enfin Ă  sortir de son lit.<br /> Sous la douche elle continua Ă  se toucher. Son corps en Ă©tait alors le seul prĂ©texte, qui l’investissait de dĂ©sir.<br /> Les bras croisĂ©s les mains sur les Ă©paules. Elle enserrait ses seins. Etreints l’un Ă  l’autre, recouvrant leur propre creusement dans le cheminement de leur paresse, infiltrant l’eau comme s’infiltre la pluie au roc de la source&nbsp;; source d’émoi, renouveau des terres, ils semblaient plus volumineux que de coutume. La lueur blafarde du nĂ©on traversant le rideau de la douche, se teintait d’un rouge qui donnait Ă  la pointe raffermie d’excitation, un aspect plus brun encore. La densitĂ© de son sein y devenait nodale, Ă©cueil lancinant Ă  l’ampleur de sa courbe, luisante sous l’eau savonneuse, rouge aussi comme au pourpre de l’élan. Doucement d’une main filant la courbe, elle en Ă©prouvait la pointe entre l’ongle et la peau. La tiĂ©deur de l’eau vive ramollissait tout du corps au psychique. Elle sentait grandir en elle cet Ă©tat de lassitude oĂč s’épanouissait son corps depuis son Ă©veil. La vue de ses seins, l’ample densitĂ© sous la tension des formes, l’excitait tant, qu’elle se sentit d’une fĂ©brilitĂ© extrĂȘme.<br /> Elle allait Ă  son sexe la main sans pudeur. Le majeur parcourant ses lĂšvres lentement saillies, libĂšre le fruit de sa pulpe, dĂ©loge l’organe de son fruit.<br /> Et comme le corps tendu mais tendre du violon s’emplit du toucher de la corde, elle laissait monter en elle, les puissantes vibrations de ses plus douces caresses. Ses doigts Ă©taient pleins de ce qui ne se distinguait de l’agilitĂ© de l’eau que par une Ă©paisseur aqueuse un peu grasse. Elle sentait monter en elle ce point critique, qui n’est guĂšre perceptible qu’aux premiers Ăąges de la vie sexuelle, ce point de fusion, qui n’est ni la jouissance ni l’excitation, mais la sensation mĂȘme de l’état de changement. Ni tout Ă  fait la sensation du changement lui-mĂȘme, ni tout Ă  fait la sensation de la perte ou du gain de l’état changeant&nbsp;; mais la sensation du changement comme Ă©tat mĂȘme. Sensations qui constituent tout le senti des premiers Ăąges de l’adolescence, oĂč monte au clair de la conscience –jusqu’à la perdre presque- l’épanouissement de toutes les tensions sexuelles de l’enfance dans la forme du corps adulte. Dans ses poils, ses seins, ses hanches ou ses fesses. Elle ne se voyait tout simplement pas changeante, elle changeait&nbsp;; et rendue Ă  ce point d’animalitĂ©, cela n’aurait su d’aucune maniĂšre la troubler. Elle se dĂ©possĂ©dait de quelque chose, pour se reconquĂ©rir pleinement.<br /> Le rythme de ses caresses allait s’accĂ©lĂ©rant, Ă  mesure que la mesure Ă©clatait. Une main passe sur l’autre, fraie la limite, hampe le corps par le sexe au plus profond&nbsp;; puis –d’un autre doigt- par l’interdit. Doublement bordĂ©e, dans son arrĂȘt, elle se sentait devenir forme. Au plus profond de ce qui n’était plus tout Ă  fait elle-mĂȘme, elle se sentait devenir forme pure sans matiĂšre. Plus son corps s’inflĂ©chissant, rejoignait le cercle de la jouissance, plus elle se sentait Femme. S’accĂ©lĂ©rant encore, ses caresses, elle devenait son corps. Son corps plein. Comme un astre. Arc-boutĂ©e. Ronde sur elle-mĂȘme. Elle filait la ligne d’univers, elle filait jusqu’au jouir qui pointait dĂ©jĂ  comme l’étoile Ă  l’orĂ©e du jour dans la nuditĂ© de sa transparence. Puis la dĂ©charge.</p> L’invisible, l’érotisme et la pornographie. urn:md5:c4769566819f4646662f218e813325d3 2009-09-13T22:54:06+00:00 2019-03-07T20:25:28+00:00 jean L'idĂ©e c'est la perspective <p>Comment l'enfant qui rĂȘvait dans le verre faisait aussi l'expĂ©rience de la pornographie.</p> <p>Je savais depuis tout petit ce qu’était exactement l’érotisme. Aujourd’hui je dirais une odalisque d’Ingres&nbsp;; lascive et apaisĂ©e lorsque tout en elle est, jusqu’à l’étoffe dĂ©voilante, manifestation d’une intĂ©rioritĂ©. Un secret, son secret, dont seule la prĂ©sence est prĂ©sentĂ©e, tĂ©nue, fragile mais, lui, retenu dans son secret. «&nbsp;Il y a » un secret&nbsp;; un secret de l’apollinien renversĂ©&nbsp;: «&nbsp;Connais-moi moi-mĂȘme » m’enjoint-elle dĂ©sirable, d’un dĂ©sir offert Ă  l’ouvert, infiniment rĂ©itĂ©rable. J’en avais fait l’expĂ©rience originelle dans une bille de verre.<br /> Si l’on s’en souvient, nous avions, petit, au moins deux sortes de billes&nbsp;: les billes en terre vĂ©nĂ©rĂ©es par les plus vieux de nos pĂšres Ă  la mĂ©moire d’argile, et les billes de verre, que nous-mĂȘmes vĂ©nĂ©rions d’un mysticisme naissant et profane. La terre se camouflait, certes, d’elle-mĂȘme mais sans mystĂšre, se continuant identique sous l’opacitĂ© de sa surface, aussi peu attrayante qu’une mie de pain roulĂ©e, cache qu’elle n’a rien Ă  cacher. Le verre
 rĂȘvait infiniment la cachette. Du verre Ă  l’argile c’est une autre mystique qui se raconte. De mĂȘme que du sillon de l’argile Ă  la rue de nos villes, un autre monde devait s’ériger&nbsp;: le monde de la pornographie.<br /> Si la terre prĂ©sentait un non-savoir d’elle-mĂȘme que l’on pouvait s’imaginer savoir, une espĂšce de nĂ©gativitĂ© fonciĂšre (la terre dans sa profondeur de terre que l’imagination portait au paraĂźtre, dĂ©veloppait le nĂ©gatif sans support photographique –comme Ă  la maĂźtrise de la tĂąche, s’épanouie du sillon le mystĂšre de la terre) la transparence du verre offrait pour sa part le plus grand des mystĂšres au sein mĂȘme de sa splendide parence. Tout y Ă©tait Ă  voir, tout y Ă©tait plein. Mais Ă  l’Ɠil de l’enfant, il y Ă©tait Ă  voir que tout ce qui Ă©tait vu n’était pas vu, qu’il s’y Ă©chappait quelque chose Ă  la prise du regard, quelque chose d’absolument immaĂźtrisable, quelque chose de la modernitĂ©. Quelque chose Ă©tait inouĂŻ –ou Ă  lettre invu- dans cette bille de verre oĂč rĂȘvaient Ă©ternellement d’une transparence absolue ces saillis d’encre, rouges ou vertes mĂ©dusĂ©es&nbsp;: le phantasme.<br /> CartĂ©sien avant l’heure de raison, elles passaient sans repos de la rĂȘverie de nos yeux Ă  celle de nos doigts. Lorsqu’à la croisĂ©e de ces errances sensibles, rien ne nommait au-delĂ  de nos billes-lĂ  notre fascination, elles donnaient frottĂ©es l’une Ă  l’autre, de petits crissements comme autant d’indices de la sexualitĂ© du verre. Petits effets de matiĂšre, petits coĂŻts de la bille au cours du quel le mystĂšre n’apparaissait pas plus qu’auparavant&nbsp;: Quelque chose rĂ©sistait sans cesse dans la clĂŽture du mystĂšre. Ça rĂ©sistait Ă  l’analyse sensible, Ă  la sexualitĂ© du frottement, aux excĂšs de rage portĂ©s Ă  coups de pierre lorsque s’éprouvait la rudesse du mystĂšre, tandis que dans le mĂȘme temps, s’apaisait la colĂšre proportionnelle Ă  l’inflation du cachĂ©. D’une stĂ©rilitĂ© masturbatoire, les excĂšs du corps calmaient l’excitation du mystĂšre&nbsp;; mais la tranquillitĂ© retrouvĂ©e, le mĂȘme mystĂšre demeurait intact.<br /> Tout y Ă©tait montrĂ© jusqu’à l’outrance pourtant il y manquait quelque chose qui fascinait le regard, excitait tout le corps. D’autant qu’aucune expĂ©rience n’était envisageable au-delĂ  de celle de sa propre incapacitĂ© masturbatoire au bout du calme de laquelle les troubles rĂ©itĂ©raient toujours leur prĂ©sence. C’est lĂ , dans ce qui Ă©tait pour l’enfant perdu dans la rĂȘverie du verre insoumise Ă  la prise du regard, l’insaisissable mystĂšre, que fut ma premiĂšre image pornographique, la premiĂšre domination outrageante de l’invisible sur le tout –parfois trop- visible. Outre-monde de rĂȘveries salutaires que ne pouvaient connaĂźtre nos pĂšres, ceux qui du sillon, par leurs incantations maĂźtrisant le mystĂšre, faisaient surgir les promesses d’une terre, un monde de la ruralitĂ© qui ne pouvaient soupçonner l’essence mĂȘme de la pornographie, notre nouvelle mystique.</p> Les mots invisibles et la schizophrĂ©nie du visible urn:md5:7aa0d9b0b84196914585dc43aefce669 2009-09-13T22:37:14+00:00 2019-03-07T20:25:28+00:00 jean Philosophie <p>Texte publiĂ© dans le premier numĂ©ro des Cahiers d'AdĂšle, L'invisible.</p> <p>Parlant du visible et de l’invisible, d’une part, nous parlerons de notions plus que de mots ou de concepts afin de mettre Ă  l’index leur caractĂšre indĂ©terminĂ©. Le mot, le concept dĂ©signent des choses ou objets&nbsp;; visible et invisible ne sont ni des choses ni des objets mais des milieux au sens d’un Ă©cosystĂšme des signes ou d’une Ă©co-sĂ©miologie.<br /> D’autre part, comme le dedans et le dehors, le recto et le verso, le visible et l’invisible forment un couple de notions distinctes mais insĂ©parables. Si nous pouvons parler de l’un sans penser Ă  l’autre, ils n’en demeurent pas moins unis dans le rĂ©el. Il s’agit de ce que la philosophie mĂ©diĂ©vale nommait une distinction de raison.a pensĂ©e sĂ©pare ce qui ne l’est pas dans le rĂ©el . Car s’ils sont numĂ©riquement distincts – puisqu’il y a l’un, puisqu’il y a l’autre et que l’un n’est pas l’autre – ils ne le sont pas rĂ©ellement. De mĂȘme qu’il n’y a pas de recto sans verso, de largeur sans longueur, d’extĂ©rieur sans intĂ©rieur, il n’y a pas de visible sans invisible. Car tout visible a un dedans, un derriĂšre, etc. Tout visible recĂšle en lui une part d’invisibilitĂ©.<br /> Cependant, contrairement aux couples de notions citĂ©es, visible et invisible ne sont pas numĂ©riquement distinct. Car le visible est potentiellement un invisible, l’invisible potentiellement un visible&nbsp;; il n’y a pas l’un, il n’y a pas l’autre, l’un est potentiellement l’autre et rĂ©ciproquement. Prenons l’exemple cĂ©lĂšbre de la phĂ©nomĂ©nologie husserlienne, le cube. Lorsque je regarde un cube, je ne vois Ă  proprement parler jamais un cube. Seules trois de six faces me sont perceptibles d’un seul regard. Et lorsque les trois faces inapparaissantes entrent dans le visible, les trois autres disparaissent. A la lettre je ne vois jamais un cube, tout visible se double de son invisible. Il y a de la faussetĂ© dans l’affirmation&nbsp;: «&nbsp;Je vois un cube. » <br /> Si l’exemple du cube est pour nous paradigmatique, il en va de mĂȘme pour toute autre perception de choses. La perception du rĂ©el est faite d’esquisses qui tour Ă  tour apparaissent et disparaissent. Nous n’embrassons jamais le rĂ©el d’un seul regard.<br /> Je ne vois jamais les choses et pourtant je les nomme. Une voiture passe dans la rue, le bruit du moteur envahit le silence, la lumiĂšre des phares fait jouer l’ombre des persiennes sur le mur de ma chambre, Ă  proprement parler je ne vois pas cette voiture et pourtant je dis «&nbsp;une voiture passe dans la rue ». Cette voiture n’existe pas, la crise des subprimes, la rĂ©volution française n’ont pas eu lieu, pas plus que ce «&nbsp;terrible cinq heures du soir » dont parle Deleuze Ă  la suite de Fitzgerald. Nous n’en avons que des esquisses, les fragments visibles d’un rĂ©el Ă©clatĂ©. Ce que nous nommons n’appartient pas au rĂ©el car ce que le mot signifie n’est pas la chose mais l’unitĂ© du concept, unitĂ© que ne possĂšde pas l’objet ou la chose tenue au regard. Les concepts que nous nommons sont des objets de la raison qui ne prĂ©sentent aucunes racines rĂ©elles. Parler d’une chose, c’est aller au-delĂ  du sensible, au-delĂ  du visible vers le concept qui constitue le point de convergence de toutes les sĂ©ries sensibles, du visible infiniment morcelĂ©s, infiniment Ă©clatĂ©. Leibniz avait raison de dire que nous ne percevons jamais le bruit d’un vague. Ce que nous percevons – sans nous en apercevoir – c’est le bruissement de la multitude infinie des gouttelettes se choquant qui constituent cette vague. Je ne perçois jamais la chose que je nomme. L’objet n’existe jamais qu’en tant qu’invisible. Jamais dans ses esquisses visibles l’objet ne resplendit d’une prĂ©sence pleine et entiĂšre. Parler d’une chose c’est aller au-delĂ  de ce qui en est donnĂ© au sens, c’est aller du visible Ă  l’invisible, au concept vers lequel convergent toutes les esquisses. Et c’est parce que nous parlons dans l’invisible, parce que l’invisible est le milieu de la parole, que nous avons la possibilitĂ© du mensonge ainsi que la possibilitĂ© de dĂ©lirer le sens en non sens. Mais c’est aussi parce que l’invisible est le milieu de la parole que le non sens fait encore sens. C’est parce que nous parlons dans l’invisible que le «&nbsp;bleu » se dit aussi bien par sa longueur d’onde dans le langage de la science, que par ce bleu dont parle Claudel&nbsp;: «&nbsp;un bleu si bleu qu’il n’y a que le rouge du sang qui soit plus rouge encore ». C’est parce que nous parlons dans l’invisible que le sens se dit dans tous les sens, de la rigueur scientifique au dĂ©lire poĂ©tique comme autant de maniĂšre de faire le monde en le disant.</p> « Je ne vois pas la cachĂ©e dans la forĂȘt » urn:md5:ae2848ebeaeb89ae2143918d94c3b80d 2009-09-13T22:31:57+00:00 2019-03-07T20:25:28+00:00 jean Art <p>A propos du tableau de Magritte. Texte publiĂ© dans le premier numĂ©ro des Cahiers d'AdĂšle.</p> <p>«&nbsp;Je ne vois pas la cachĂ©e dans la forĂȘt »<br /> <em>L’art ou le dĂ©voilement de l’ĂȘtre occultĂ©</em><br /></p> <p>Par un tour de passe-passe grammatical, le titre de l’Ɠuvre de Magritte Ă©tablit une loi d’essence Ă  la dissimulation. Il est sans doute du propre du cachĂ© de pouvoir apparaĂźtre, ĂȘtre vu ou dĂ©couvert. Ce n’est sans doute qu’un temps et par accident que ce qui est, peut nous ĂȘtre dissimulĂ©. Or en substantifiant l’adjectif «&nbsp;cachĂ© », Magritte pose un paradoxe du visible&nbsp;; plus que d’ĂȘtre cachĂ©e, la fille du tableau de Magritte est «&nbsp;la cachĂ©e », celle qui par son ĂȘtre mĂȘme – substantifiĂ© comme cachĂ© – ne saurait apparaĂźtre. Or ce qui ne saurait apparaĂźtre puisque son ĂȘtre mĂȘme est le cachĂ©, ne saurait ĂȘtre. Etre soi-mĂȘme et en soi-mĂȘme le cachĂ© revient purement et simplement Ă  ne pas ĂȘtre.<br /> Il est intĂ©ressant par ailleurs de noter que le mot chose qui vient du latin Causa qui a donnĂ© le mot «&nbsp;cause », se traduit par le latin Res. Or Res est aussi le terme latin duquel dĂ©rive le mot «&nbsp;rien ». Il y a donc par l’astuce de la langue, une profonde corrĂ©lation entre la chose et le rien. Que la chose mĂȘme soit un pur nĂ©ant, c’est ce qu’atteste pour nous le tableau de Magritte. Pourtant sous les traits d’une fille, elle apparaĂźt sur la toile cette cachĂ©e. Magritte contredit lui-mĂȘme son premier paradoxe qui consiste Ă  dĂ©terminer l’ĂȘtre par le cachĂ©, en faisant apparaĂźtre ce qui est en sa substance, cachĂ©. Divagation surrĂ©aliste ou vĂ©ritĂ© ontologique ?<br /> En rĂ©alitĂ© Magritte rĂ©pĂšte les fondements de la tradition mĂ©taphysique pour laquelle il est du propre de l’ĂȘtre de ne pas apparaĂźtre&nbsp;: «&nbsp;Ce qui est, ni ne se sent ni ne se voit ni ne se donne&nbsp;; ce qui se sent, se voit, se donne, n’est pas ». Telle est la formule par laquelle Jean-Luc Marion Ă©nonce le paradoxe du dĂ©ficit phĂ©nomĂ©nologique de l’ĂȘtre dĂ©terminĂ© par la substance. En effet, si l’ĂȘtre est dĂ©terminĂ© par la substance comme ce qui demeure sous les changements qualitatifs mais visibles, la substance elle n’apparaĂźt pas. Le morceau de cire peut bien changer d’aspect, d’odeur de couleur de consistance, bref changer du tout au tout, il n’en demeure pas moins le mĂȘme morceau en vertu de ce qui dans le sensible n’apparaĂźt pas, l’unitĂ© de sa substance, l’ĂȘtre mĂȘme auquel se rapporte toutes ses qualitĂ©s sous la forme logique&nbsp;: la substance cire est jaune, rouge, dure, molle, etc. Le premier paradoxe n’en est plus nu au regard de la tradition de la mĂ©taphysique qui dĂ©termine l’ĂȘtre par l’inapparence.<br /> Reste le second paradoxe. La cachĂ©e est l’ĂȘtre mĂȘme dĂ©terminĂ© par la substance. Mais ce cachĂ© en soi et pour soi peut-il entrer dans le visible sans contredire sa dĂ©termination absolue et substantielle de cachĂ©&nbsp;? Comme l’atteste le tableau de Magritte, l’art permet un tel dĂ©voilement de l’ĂȘtre dans le visible. C’est sous les traits du beau, lorsque le beau depuis Kant au moins, outrepasse les catĂ©gories de l’objectivitĂ© pour atteindre Ă  la chose mĂȘme qui reste dans nos prĂ©occupations quotidiennes fondamentalement cachĂ©e, que l’ĂȘtre mĂȘme peut apparaĂźtre. Heidegger a bien montrĂ© qu’il Ă©tait du propre de l’ustensile de ne pas apparaĂźtre tant qu’il est en usage. Et de prime abord et le plus souvent c’est sur le mode de la prĂ©occupation que nous commerçons avec les choses du monde. ConsidĂ©rer la chose du point de vue de son utilitĂ©, c’est nier sa spĂ©cificitĂ© au profit de sa finalitĂ©. Dans l’usage, la chose disparaĂźt, et ce n’est que dans la panne, dans l’annulation de ce en vue de quoi elle est faite, que la chose m’apparaĂźt telle qu’elle est. Je ne vois pas le marteau dont je me sers autrement que dans l’efficacitĂ© de son usage. La tour Eiffel par exemple resplendit dans l’Ɠil virginal du touriste japonais, comme elle a resplendi une fois au moins dans l’Ɠil novice du parisien avant de s’abĂźmer dans l’utilitĂ© quotidien comme lieu d’habitude et d’usage dans lesquels la tour a fini par disparaĂźtre. Par l’usage je ne vois plus ce qui m’entoure. On comprend dĂšs lors l’importance d’artistes comme Christo ou Duchamp. C’est en les faisant disparaĂźtre sous ses toiles tendues que Christo fait apparaĂźtre les choses qui disparaissaient dans l’usage quotidien. Par ses Ready-made, Duchamp met l’objet hors d’usage, et c’est hors d’usage que la chose m’apparaĂźt comme pour la premiĂšre fois lorsqu’elle disparaissait dans l’usage quotidien que j’en faisais. NĂ©gativement chez Christo ou positivement chez Duchamp, les choses m’apparaissent en s’abstrayant de leur usage.<br /> L’art possĂšde cette possibilitĂ© de nous faire apparaĂźtre ce qui de prime abord et le plus souvent n’apparaĂźt pas&nbsp;; il ne rend pas le visible, il rendre visible, disait Klee. Et c’est dans la beautĂ© que la chose mĂȘme nous apparaĂźt. La beautĂ© n’est pas un simple jugement subjectif d’agrĂ©ment ou de plaisir. Il est depuis Kant un jugement universel sans concept. Une chose ne sera pas dite belle ni parce qu’elle me plait, ni parce qu’elle est conforme Ă  un concept relatif de beautĂ©, mais parce qu’elle resplendit d’une prĂ©sence pleine, outrepassant les limites mĂȘme de ce que peut penser la penser. <br /> LĂ  oĂč je perds ma langue, lĂ  oĂč je perds ma voix, bref si je perds l’usage, c’est la chose qui est lĂ . Et la chose lĂ  m’impose alors d’inventer un langage qui soit le sien et non le notre, un langage qui aille au-delĂ  du commun et de l’utile. Si la science arraisonne la chose aux limites de l’entendement humain et de ces catĂ©gories, l’art est fait par la chose au mĂȘme titre que l’on dit de l’amant qu’il est fait par l’ĂȘtre aimĂ© – ĂȘtre fait, pris, saisi, ravi. Le scientifique apprĂ©hende l’arbre dans le sens d’une plus grande utilitĂ©, quand il traduit l’arbre en Ă©nergie, matiĂšre et atome, c’est pour lui faire tenir le langage de la machine Ă  vapeur. Dans la langue du poĂšte c’est l’arbre lui-mĂȘme qui s’exprime dans des formes inouĂŻes sous des traits qui ne nous avaient jamais Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©s. La science objective investie l’arbre de ses catĂ©gories, l’art est investi par le silence de l’arbre qui lui impose ses formes. La science objective lorsque le poĂšte «&nbsp;arbrifie ».<br /> C’est la raison pour laquelle, Magritte sans contradiction peut bien faire apparaĂźtre sous les traits d’une fille celle qui en sa substance demeure cachĂ©e, la cachĂ©e. Si l’acquiescement Ă©claire le visage nous dit Char, la beautĂ© lui donne le refus. Ce refus est le refus de l’usage. Et dans cette soustraction Ă  l’usage elle est belle, et dans cette beautĂ© elle apparaĂźt.</p> <p><br /> <img src="http://a10.idata.over-blog.com/0/15/99/19/espace-priv-/magritte-photo2.jpg" alt="" /></p> La Peur. urn:md5:829eeef9f8641a85b0aeb8a57b327552 2009-07-12T02:12:00+00:00 2019-03-07T20:25:28+00:00 jean Les Ă©ditos d'AdĂšle <p>AprĂ©s L'Invisible, Le Faux, et L'Archive, Les Cahiers d'AdĂšle s'attaquent Ă  La Peur. Ici, l'Ă©dito du dernier numĂ©ro. A vos plumes...</p> <p>L’époque nous montre ce que la pensĂ©e nous a par ailleurs appris&nbsp;: la peur nous fait obĂ©ir. Au principe de l’obĂ©issance, elle gouverne ceux qui sont dĂ©nuĂ©s d’entendement, par des signes destinĂ©s Ă  l’imagination. L’imagination libre, insoumise Ă  l’entendement dĂ©lire ainsi les choses, et le bruit du plancher qui craque devient la visite du voleur, le pas dans la rue celui du violeur, le buisson brĂ»lant sans se consumer devient le signe de Dieu. J’obĂ©is au prophĂšte, j’obĂ©is Ă  ma mĂšre et je me retranche, et je m’abstrais de ce dont j’ai peur, de ce dont je dois avoir peur. Et la peur dessine alors des territoires, trace la ligne du mien et du tien, du bien et du mal, le cercle au-delĂ  duquel se tient l’autre, l’étrange et l’étranger. Alors certes comme l’exercice physique la peur me tient en forme au sens propre comme au sens figurĂ©. Mais cette forme n’est jamais que nĂ©gative, me dĂ©finissant Ă  partir de ce que je ne suis pas, jamais Ă  partir de ce que je suis, c'est-Ă -dire de ce que je peux. Dans la peur je suis fait par ce qui me fait peur&nbsp;; jamais tout Ă  fait moi-mĂȘme, en creux ou nĂ©gativement, je suis ce dont j’ai peur.<br /> Mais la graine qui n’a pas peur, la graine qui n’a peur de rien devient arbre, devient forĂȘt, cabane, bois de chauffe, bref, elle devient Ă  l’infini et toute chose bien au-delĂ  de sa forme. Celui qui n’a pas peur est dans la possibilitĂ© de devenir toute chose. Pour faire du cinĂ©ma affirmait Cassavetes, il faut n’avoir peur de rien ni de personne. Il en va de mĂȘme pour toute chose, pour faire il faut n’avoir peur de rien ni de personne. Et AdĂšle n’a pas peur.<br /> Dire la peur, la montrer, la raconter est-ce aussi peut-ĂȘtre une maniĂšre d’étendre le cercle de l’habitĂ©. ManiĂšre Ă  laquelle auteurs, photographes ou encore illustrateurs se sont ici attachĂ©s dans leurs diffĂ©rentes Ɠuvres, essais ou nouvelles.</p>